IX.  Site du Pont du gard
Visite

1 . Le pont Roupt 

 

             Localisation : Carte IGN 2941 Est-Remoulins ou carte Michelin n° 82

                Le pont de Font Ménestière donne dans une nouvelle dépression, la troisième sur quelques centaines de mètres. C'est pour franchir cette dépression que les romains durent édifier ce beau monument : le Pont Roupt.

                A propos de l'orthographe :

                Ce pont de 275 mètres de long et de 7,5 mètres de haut par endroits doit son nom à sa rupture dont on ne saurait dater l'époque.

                 Pont roupt = pont rompu. Selon les spécialistes de la langue occitane, l'orthographe de ce mot offre deux possibilités : "pont rout" ou "pont roupt". Les félibres ne prononçaient en général pas les consonnes finales. C'est ainsi que des non spécialistes de la langue d'Oc ont déformé l'orthographe de roupt ou rout en rou, ce qui est linguistiquement incorrect. Nous attachons un certain prix à la conservation des traditions et nous optons pour l'orthographe d'origine.

                  La visite :

                   Le Pont Roupt constitue le support bâti indispensable au maintien de l'aqueduc à sa côte de soixante cinq mètres. Constitué par trois tronçons qui laissent penser à l'articulation des anneaux d'une chenille, l'ouvrage est formé d'un ensemble d'arcades suffisamment hautes pour que les pieds du promeneur qui observe l'arche rompue se trouvent à un niveau très voisin de celui du Castellum à Nîmes.

                   Les arches sont hautes et le sol est moins stable. Les arches prennent appui sur du gros appareil. Comme pour les arches de la Lône, les contreforts font partie intégrale dans la maçonnerie. Ils prennent appui sur des blocs cruciformes posés sur des fortes assises. Le long du premier tronçon il est aisé de remarquer sur les blocs de la base les trous qui servaient de points d'appui aux leviers des maçons.
                   Le canal a disparu sauf en de rares endroits où il ne reste que des lambeaux de piédroits.
                   Pour renforcer l'ouvrage menacé par les fuites ou pour résister aux secousses sismiques (?) certaines arches ont été bouchées de part en part. D'autres ont été obturées par deux murs latéraux.
                   Le monument est en mauvais état. Les pouvoirs publics semblent ne pas le respecter : on n'a pas hésité à planter un poteau électrique à cinq mètres de l'ouvrage. Des piliers défaillants ont été renforcés récemment par les bons soins d'une association, mais l'habillage externe qui incombe aux services du Patrimoine se font attendre.
                    Le long des premiers et second tronçons, sur le côté gauche, une murette remontée par les services de l'O.N.F. sépare une chênaie d'une oliveraie nouvellement réaménagée. Les murettes étaient construites en pierres sèches posées à plat. Pour la dernière rangée le bâtisseur rangeait les pierres verticalement. Cette disposition assurait une belle finition et permettait de contrôler d'un coup d'oeil le bon état du mur. Tout vol de pierre était immédiatement visible.
                     Jusqu'en 1914 les oliveraies étaient fort bien entretenues. Les olives de la région sont appréciées pour la qualité de l'huile qu'elles produisent et pour les olives vertes, les "picholines", qui se consomment en de nombreuses circonstances.

                     Le deuxième tronçon se termine par une rupture. Les piliers ont basculé sur la rive droite formant un chaos informe dans les chênes verts.

                     Traversons le chemin communal qui se glisse entre les deux parties rompues. Ce chemin conduit au Pont du Gard. Nous arrivons ainsi à la partie nord du troisième tronçon. Au départ, sur la rive gauche contre le pont, nous découvrons deux amas carbonatés. Ils sont énormes. Le second est si volumineux  (200 m3 environ) que nous n'imaginerions pas son origine si ne la connaissions pas : Ces deux amas se sont formés à la suite de piqûres pratiquées pour l'irrigation des cultures.
                      Le premier amas s'est développé le long d'un mur de soutènement de l'arche sur la partie gauche du monument. Ce mur, aujourd'hui disparu, a laissé des traces sur l'arcade. Sous cette arche on pouvait voir les effets néfastes d'une bactérie qui prolifère dans les milieux humides au dépens de la roche. La dégradation qui en résulte est communément appelée "maladie de la pierre". Depuis avril 1996, des gens peu respectueux des vestiges ont allumé un grand feu sous cette arche qui maintenant est noircie.
                       L'énorme amas nous rappelle la forte teneur  en bicarbonate de l'eau de la Fontaine d'Eure pourtant si limpide.
                       On peut grimper sur cet amas à condition de ne pas monter sur l'aqueduc car on provoquerait une dégradation accélérée du vestige et on risquerait un accident : un effondrement est toujours possible. Si l'on monte sur l'amas - qui lui est solide, compact et résistant - on peut s'orienter aisément : on a Uzès devant soi, légèrement à droite, Nîmes sur la gauche et les gorges du Gardon entre les deux, légèrement sur la droite. Derrière soi se trouve le Pont du Gard perpendiculaire au Pont Roupt. Nous trouvons devant nous, à vingt mètres, un vaste espace boisé qui s'étend jusqu'en haut de la colline de Martian.

                       La protection de ce site est demeuré l'un des principaux objectifs de notre association : le CIDS (Comité de défense du site du Pont du gard) dans la lutte qu'il a mené contre différents projets dits "d'aménagement du site du Pont du Gard". Lire, à ce sujet, le Pont du Gard l'a échappé belle  de Claude Larnac, aux éditions Lacour - Nîmes.

                       En redescendant de cet amas, nous nous trouvons sur la rive gauche que nous abandonnons tout de suite en contournant l'arche rompue. Nous cheminons le long du pont qui se trouve sur notre gauche. Nous rencontrons des arches ouvertes, d'autres bouchées à l'époque romaine et d'autres encore obturées beaucoup plus tard pour en faire des abris peut-être. A trente mètre à partir de l'arche rompue, sous une des dernières arches, s'est développé un très gros bloc de carbonate de 2 ou 3 m3, résultat d'une fuite du canal,  l'eau ayant emprunté une voie favorable dans les piliers. Cet amas est probablement constitué par les mêmes éléments que les amas qui résultent des piqûres. Seul le mode de formation est différent : cet amas ne résulte pas d'une intervention volontaire de l'homme mais d'une infiltration au travers d'un aqueduc défaillant.

                       Les concrétions déposées sous forme de tapisseries tout le long du canal sont très nombreuses. On peut les observer tout au long de la visite. Leur présence pose le problème du rendement de l'aqueduc : Quelle proportion de l'eau captée à la source atteignait le Castellum à Nîmes ? Les chiffres manquent. Les Romains avaient d'excellents topographes et architectes mais, peut-être, ont-ils manqué d'excellents entrepreneurs ou d'entrepreneurs sérieux ?

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