L'aqueduc de Nîmes
Visite

VII . Le pont à arcades de la Lône

 

             Localisation : Carte IGN 2941-Est-Remoulins

               Le pont à arcades de la Lône se développe à partir de la chaîne. Il suffit de longer le chemin barré par cette chaîne et les premiers vestiges apparaissent sous la végétation.

         Intérêt de la visite :

           Du pont des arcades de la Lône au Pont du Gard le trajet est facile. Les vestiges sont nombreux, variés et importants. Cette situation particulière est due à la dépression du relief qui amorce la vallée du gardon.

                 Le nom du site :

            Une "lône" est une terre humide. Le secteur dont nous parlons est, au contraire, sec et même aride. Son altitude varie entre 60 et 65 mètres. Il doit son nom à la proximité de la "Lône basse", humide et recouverte d'alluvions où croît une végétation verdoyante. Les intarissables sources de Misserand en font la richesse.

                  Etat hydraulique :

          La Lône basse : Des sources pérennes assurent la fraîcheur des lieux et permettent l'irrigation de nombreux jardins. La Fontaine de Misserand alimente un lavoir dont la bâtisse bien structurée est un monument inscrit à l'inventaire des Monuments historiques. La municipalité de Vers a su conserver à ce bâtiment son authenticité. L'eau coule en permanence. Elle rend service aux promeneurs. Bien des habitants de Vers et des villages voisins y remplissent bonbonnes et jerricans. Malgré le surnom de cette fontaine - dite des "caluds", fous en occitan - son eau, qui a la réputation d'être excellente, ne semble avoir aucun effet désastreux sur le comportement de ceux qui la boivent. De l'eau en abondance, fraîche et gratuite, ... cela mérite bien un arrêt !
               Cent mètres plus bas, sur la droite en direction de Remoulins, coule la fontaine basse de Misserand dite encore "Fontaine des grenouilles". Elle alimente un bassin qu'elle ne remplit jamais puisque l'eau s'évacue au fur et à mesure vers les rigoles d'arrosage. La fontaine coule dans une vasque en pierres façonnée située elle-même dans une enceinte en pierres bâties à ciel ouvert.
               Compte tenu de la fraîcheur permanente, de la bonne qualité de la terre et de l'abri du vent, la végétation se développe rapidement. Elle envahit la belle fontaine des grenouilles qu'il convient de débroussailler chaque année.
               De toutes petites résurgences, au fond du bassin récepteur, dessinent des ronds concentriques qui s'agrandissent à la surface de l'eau.
               L'abondance de l'eau a permis, jusqu'au milieu du XXème siècle, la culture de la menthe. 
               La Lône "basse" bien arrosée mérite bien son nom.

          La Lône haute : C'est celle des garrigues, celle des pauvres. Selon une logique bien établie, les paysans les plus riches possédaient les terres riches, en bas.
               Les pauvres se partageaient celles du haut parcourues par l'aqueduc. En faudrait-il plus pour comprendre pourquoi, au moins à partir du Vème siècle, moment où l'aqueduc avait perdu sa fonction d'adducteur d'eau, les paysans pauvres de la Lône du haut perçaient le canal devenu inutile pour irriguer leurs mauvaises terres ?

               Dégâts le long des ponts de la Lône :

  • Le canal de l'aqueduc a disparu en totalité. Il ne reste plus que les supports : murs ou arches.

  • Un mur de renfort, le long des arches, longe le côté droit en contrebas.

  • Quelques dizaines de mètres de la paroi droite est renversée par-dessus le mur de renfort. On retrouve, par terre, à un mètre du monument, des moellons recouverts par le mortier de tuileau qui laisse apparaître, par endroit, le badigeon rouge et, par dessus, des concrétions noirâtres dont la face la plus interne est irrégulière et granuleuse. Ce sont les indices d'une chute postérieure au fonctionnement de l'aqueduc. A gauche des arcades des renforts perpendiculaires ont été surajoutés.

               Ces quelques observations ont amené les scientifiques à retenir l'hypothèse selon laquelle cette région est sujette à des séismes rares mais relativement intenses. Le mur de renfort longitudinal sur la rive droite et les renforts surajoutés sur la rive gauche auraient joué, en quelque sorte, le rôle d'attelles après une première secousse sismique. Les lambeaux de paroi, renversées par dessus, seraient les indices d'une seconde secousse.
               D'autres observations à l'intérieur de l'espace créé par les arches confortent ces hypothèses.
               Le bouchage des arches de bout en bout, par des murs latéraux, ne se justifierait-il pas pour les mêmes raisons ? Les archéologues s'interrogent.

               Remarques sur les méthodes de construction des arches :

               Au point le plus bas de la dépression, le pont est détruit au niveau d'une arche.
               L'observation permet de comprendre les étapes de la construction de l'aqueduc : 

  • Une base solide constituée de blocs massifs liés entre eux par des ajustages du genre "tenon-mortaise".

  • Au dessus de l'assise précédente sont placés des blocs aussi importants, cruciformes. Ils étaient ajustés par rapport à ceux du bas à l'aide de leviers dont les points d'appui sont matérialisés par des trous bien visibles.

  • Les piliers sont alors bâtis en petit appareil, moellons de 20 par10 cm, dont les faces sont très soignées.

  • L'intérieur est rempli de tout-venant. ( Le Pont du Gard serait-il monté selon des principes comparables ? )

  • Par dessus les arches était construit le canal avec son radier, ses parois, les couches d'enduit de tuileau, la pellicule de peinture rouge et le départ de la voûte. C'est un des rares ponts de l'aqueduc où le départ de la voûte se voit aussi nettement.

               Cet énoncé rapide recouvre toute une histoire. Les arches de la Lône se prêtent effectivement à l'élaboration de toutes les théories construites sur l'histoire de l'aqueduc, celles des archéologues des siècles passés ou de ceux d'aujourd'hui, des amateurs, des conservateurs de musées ou des habitants de la région. Toute la partie versoise des vestiges constitue le tissu pédagogique par excellence de l'histoire de l'aqueduc, le lieu où il nous la raconte lui-même de la façon la plus visible.

               Visite du pont de la Lône :

         Nous voici toujours au niveau de la chaîne. Pour visiter les ponts de la Lône nous pouvons emprunter n'importe lequel des deux sentiers :

  • Le sentier de la rive droite : Nous découvrons, en particulier, les trois amas carbonatés. Cent mètres avant le point le plus bas nous apparaissent les dégâts signalés plus haut.
    Plus loin le sol s'élève. La dépression s'estompe. Les arches, qui d'abord diminuent de hauteur, disparaissent et cèdent la place à une série de murs bahuts dont les bases ne sont ajustées que grossièrement. Le radier atteint le niveau du sol.
            Les murs bahuts disparaissent ensuite car, très vite, une nouvelle dépression s'amorce. De nouvelles arches se développent. C'est le "pont de Font Ménestière". Le même  schéma tend à se renouveler mais les destructions sont telles qu'il vaut mieux profiter au maximum des observations que nous offrent les arches de la Lône.
             Dans la partie ascendante, après le point le plus bas, sur quelques mètres, se suivent les trois forment de supports : arches renforcées, arches sans renfort puis murs bahuts et disparition de l'aqueduc dont le radier atteint le niveau du sol.

  • Le sentier de la rive gauche : Il n'y a pas d'amas mais de nombreux dépôts carbonatés tapissent les parois.
              On découvre un puits romain, dit-on, dont l'alimentation est canalisée par une conduite voûtée de quelques mètres.
               Perpendiculaires au monument, des renforts sont surajoutés.
               Après l'arche détruite qui marque le point le plus bas de la dépression, les trous pour engager les leviers ayant permis la mise en place sur la pierre de base sont, au départ, biens conservés.
               Tout au fond, dix mètres avant la jonction des ponts de la Lône et du pont de Font Monestière, les archéologues ont signalé, sur le côté gauche de l'aqueduc, une concrétion de 2,1 mètres porteuse de deux couches d'enduit de tuileau : la couche d'origine, normale et une couche intérieure qui prouverait donc un essai de réhabilitation de l'aqueduc au IVème ou Vème siècle.

 

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