C . Le
réseau hydrographique
La
configuration du réseau hydrographique explique certaines difficultés
qu'on dû rencontrer les Romains pour tracer l'aqueduc.
1 . Le Gardon
Long de 100 kilomètres, ce
fleuve doit ses espiègleries à ses origines. Il prend sa source en
pays cévenol. Il coule ensuite dans une plaine, la Gardonnenque,
jusqu'à Russan.
A partir du "Rocher de Vidal" à Bourcoiran, il emprunte deux
itinéraires : l'un en surface, l'autre souterrain.
Les deux parties se rejoignent une vingtaine de kilomètres plus
loin, progressivement entre la Baume et Collias. L'été, le cours
superficiel est complètement sec entre Russan et le Pont-Saint-Nicolas
ou la Baume.

Le débit et le niveau de l'eau au Pont du Gard dépendent étroitement
de ces sautes d'humeurs.
Selon Guilhem Fabre, dans une étude préalable au classement du site
des Gorges du Gardon, le débit du Gardon à la Baume aurait été de
1,10 m³ à la seconde en août 1971 et de 1 183 m³ par seconde le 10
janvier 1970 (maximum instantané). Soit une variation de 1 à 1000. Des
écarts très supérieurs ont été relevés au début du siècle.
C'est pour traverser le Gardon que les Romains construisirent le Pont du
Gard...
L'aqueduc étant situé en rive gauche du Gardon jusqu'au Pont du Gard,
seuls les affluents de cette rive : Alzon, Bornègre, ont posé
problème aux constructeurs romains.
2 . L'Alzon
Long d'une vingtaine de kilomètres il prend sa source près du petit
village de Masmolène. Le débit très variable de l'Alzon a dû poser
de sérieux problèmes aux constructeurs de l'aqueduc compte tenu de la
proximité des deux voies d'eau.
De nos jours, les sources de l'Eure rejoignent rapidement les eaux de
l'Alzon au niveau d'un confluent où il est aisé de distinguer les eaux
limpides de la première des eaux boueuses du second.
Un
grand nombre d'installations étaient implantées le long de son cours :
filatures, moulins à eau (dont quelques-uns subsistent : moulin de la
réglisserie Zan à Pont de Charette -commune d'Uzès-, moulin du Gaveau
à Saint Maximin, moulin à huile de Collias qui fonctionnait encore
après la guerre de 1939-1945.) Ces installations qui ne consommaient ni
énergie fossile, ni électricité nucléaire sont en ruine.
L'Alzon qui
reçoit les sources de l'Eure très riches en bicarbonate de
calcium, est marqué, lui aussi, à partir d'une certaine distance par
des dépôts carbonatés comparables à ceux déposés sur les parois de
l'aqueduc.

3 . Bornègre
C'est l'enfant terrible de l'Uzège (Les Uzétiens habitent Uzès, les
Uzégeois habitent l'Uzège). Ce torrent qui tient plus de l'oued
que du ruisseau, sec la plupart du temps, peut débiter de 2 000 à 5
000 litres d'eau par seconde en période de crue.
Il serait dommage, sur le plan de la compréhension, de visiter le pont
romain de Bornègre sans s'être rendu au gouffre.
Bornègre est un siphon qui s'amorce lorsque l'eau atteint un niveau
critique. Ses crues étant peu fréquentes on leur attachait, et on leur
attache parfois, une origine mystérieuse. Chacun a ses théories et
n'en démord pas. On aime les mystères surtout lorsqu'on les associe à
son environnement. De nos jours n'attache-t-on pas des vertus à
certaines phases de la lune, ne leur attribue-t-on pas le rythme des
naissances, la croissance des plantes ou la mauvaise humeur d'untel ?
En ce qui concerne Bornègre, on aime croire à une origine inconnue de
ses eaux. Elles proviennent qui sait d'où ?
Des
spéléologues, des géographes ont apporté des réponses à cette
question. Bornègre est une des exurgence qui appartient à un vaste
réseau hydraulique défini. Celui-là même qui alimente les sources
d'Eure et peut-être même le Puits de Vayer à Castillon-du-Gard.
M. Guilhem Fabre, directeur de recherche au Centre National de la
Recherche Scientifique, a étudié Bornègre. Il a écrit une
monographie sur cette "émergence temporaire" qui tirerait son
nom de racines provençales borgno = bouerno = bourno = bouorgno =
creux, cavité. (Cf. latin bornellus) et nègre = noir. Il évoque
encore deux autres origines : l'une provençale : bourneu, bournel,
bornel, bourné = tuyau de fontaine, l'autre celte : born = fontaine.
L'étymologie de Bornègre serait significative de cette cavité noire.
L'orthographe de la carte d'Etat-major : Bordnègre, serait discutable.

Le sommet des collines, au-dessus de Bornègre est truffé de gouffres
et de puits de mines de phosphates dont les abords sont dangereux. Ils
furent exploités pendant une quarantaine d'années de 1883 à 1923.
A
leus propos, M. Guilhem Fabre écrit : " Au début il y avait 200
ouvriers. Des wagonnets chargés puis tirés par des chevaux
déversaient le minerais sur une aire de repos ; là, des charettes
étaient à leur tour approvisionnées ; on y mettait de 3 000 à 3 500
kg ; le minerai était apporté dans des bassins de décantation au Pont
des Charettes au début, puis au Pont du Gard par la suite.(...) Les
mineurs s'éclairaient à la lampe à huile puis au carbure (...) Dans
les gisements, des ossements fossiles de la fin du tertiaire et du
commencement du quaternaire furent découverts là, à une époque où
n'avait été trouvé que des débris du Paléotherium dans l'Eocène
des environs d'Euzet-les-Bains, quelques membres épars du cheval
sauvage, du renne, du cerf et des restes de quelques animaux domestiques
dans les habitats préhistoriques de la vallée inférieure du Gardon
(...) Un examen minutieux des fossiles... permettait de reconnaître
l'aurochs et l'urus, ancêtres de nos bœufs ainsi que la biche, la
hyène, l'ours des cavernes..."
Les rives du vallon sont couvertes de yeuses à l'ombrage desquels
prolifère le fragon (faux houx) qui reste couvert de boules rouges une
grande partie de l'année. L'accès n'est pas facile, la salsepareille
(de zarza : mûrier, ronce ; Parillo : nom d'un médecin. C'est une
plante purgative) s'étend de toute part. Elle participe à une
protection qui donne à ce site son originalité.

Calcaire fissuré, végétation luxuriante, sentiers ombragés dans la
vallée, pierraille ou boulidous (les boulidous sortent de la roche ou
de la terre. Ils expulsent une eau écumeuse qui ressemble à de l'eau
qui bout), crue occasionnelle de Bornègre, ce paysage austère mérite
respect et protection.
En Provence le cyprès exprime (en principe) le désir de bien
accueillir le passant. Un cyprès planté devant une maison signifie
"Soyez le bienvenu", deux cyprès : "Vous avez droit au
gite, trois cyprès "Chez moi vous ètes chez vous".
Site du Pont du Gard
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