Le Pont du Gard

I . Le site du Pont du Gard

 

D . L'environnement géologique

   Il y a longtemps...

      1 . Il y a 120 millions d'années.....les Gorges du Gardon

          - Cent vingt millions d'années ! C'est énorme. Quelques comparaisons : 

  • Si nous représentions l'âge du Pont du Gard, 2 000 ans, par un segment de 1 millimètre de longueur nous devrions représenter celui de la formation des Gorges du Gardon par une longueur de 60 mètres !

  • Ou encore, si nous ramenions l'âge du Pont du Gard à 1 seconde, l'âge des Gorges du Gardon serait ramené à 16 heures et 40 minutes. Cette durée est supérieure à la durée de l'ensoleillement, le 21 juin jour le plus long de l'année, à Paris (15 heures).

            - En ce qui concerne la formation des Gorges du Gardon que traverse le Pont du Gard et qui caractérise l'Uzège, le géologue André Bonnet indique que :  

          " Le pont du Gard doit son existence à son site naturel à la sortie des Gorges du Gardon. En effet, si le Gardon ne s'était pas encaissé aussi profondément dans le beau calcaire blanc d'origine récifale, que les géologues appellent "urgonien", la canalisation venant de la fontaine d'Eure (71 m d'altitude) n'aurait pu que doubler l'Alzon et se serait trouvée à une altitude trop basse (24 m) pour s'écouler ensuite sur le plateau de Sernhac.

            Quelle est donc l'origine de ces si belles gorges, qui ont d'ailleurs leurs homologues plus au nord avec une ampleur croissante, pour la Cèze et l'Ardèche ?

            L'explication est la même pour ces trois entités géomorphologiques. Les géographes physiciens (souvent confondus avec les géologues) proposent le phénomène qu'ils nomment la "surimposition" pour satisfaire notre curiosité : ils nous font remarquer que lorsqu'un continent se soulève, plus ou moins parallèlement à lui-même comme le ferait un plancher d'ascenseur très étendu, sans déformer le plancher, par opposition au mouvement tectonique qui, lui, déforme le plancher, alors la surface aplanie de ce continent se trouve exposée plus fortement à l'action des eaux courantes. Les fleuves réagissent en enfonçant leur lit à partir de l'embouchure. La rupture de pente du cours d'eau recule vers l'amont : c'est "l'érosion régressive", bien mise en évidence par les chutes du Niagara, entre autres, qui remontent vers l'amont du fleuve en respectant le tracé sinueux préétabli.
            C'est ce phénomène qui explique que le Gardon reculant a respecté tous les méandres préétablis sur une surface plane. C'est alors qu'est intervenue la profonde régression pontienne, entre 10 et 7 millions d'années, pendant laquelle la Méditerranée, fermée sur tout son pourtour, s'est évaporée. Ce retrait a provoqué une profonde entaille progressive du relief qui aurait été plus profonde encore si l'ouverture du détroit de Gibraltar n'avait mis fin à ce creusement en stabilisant le niveau marin méditerranéen par communication avec le niveau général des océans. La stabilité de celui-ci est attestée par l'absence de dépôts marins à partir de 20 millions d'années sur les plates-formes stables des continents."                           

    2 . Il y a 25 millions d'années ... à Vers-Pont-du-Gard..

         Question : " Y avait-il un être vivant jadis sur le territoire de l'actuel village de Vers qui pourrait raconter l'histoire de nos terres ?

           On pourrait s'attendre à bien des réponses : les planteurs de "cèbes" (oignons réputés à Vers), les carriers de l'époque héroïque, les Romains constructeurs de l'aqueduc, les premiers hommes qui vivaient dans les "baumes" ....

           En fait, l'être le plus ancien connu qui a vécu sur les lieux était un mastodonte. Il vivait au nord du village, il y a vingt cinq millions d'années. Il s'est noyé et a perdu une de ses molaires à trois cents mètres de l'école publique, dans un fond marin qui est devenu carrière depuis.

            Vingt cinq millions d'années c'est plus récent que la période de formation des Gorges du Gardon, mais c'est très ancien, même par rapport au Pont du Gard. Ainsi, si nous représentons l'âge du Pont du Gard par un segment de 1 millimètre, nous devrions représenter celui de la noyade du mastodonte par une longueur de 12,5 mètres, longueur d'un camion.
            Si nous ramenons l'âge du Pont du Gard à 1 seconde, nous devrions ramener celui de la noyade du mastodonte à 3 heures et 30 minutes ( c'est le temps que met le TGV pour aller de Paris à Nice.).                                                                        

            Les archéologues, MM. Rémy et Bonnet, concluent ainsi l'histoire de la dent du mastodonte versois : " ... La découverte d'un mammifère terrestre dans cette formation marine est en soi intéressante sur le plan paléogéographique, en révélant la proximité d'une zone émergée, qui ne pourrait être que la garrigue d'Uzès, à une époque où la transgression miocène semble avoir été maximale. (...) Une partie au moins de la garrigue d'Uzès a dû rester hors d'eau même au plus fort de la transgression".

            On peut voir cette dent au muséum de sciences naturelles de Nîmes, dans la salle Bayol. Son moulage est exposé à la carrière "la Romaine" à Vers-Pont-du-Gard.
            Ses caractéristiques :  Longueur  97,2 mm.   Largeur maximale  60,4 mm.

            Ainsi, il y a vingt cinq millions d'années, au milieu de l'ère tertiaire (miocène), à la suite de mouvements considérables de terrains antérieurs, la mer envahissait toute la région actuelle du Rhône, jusqu'à Blauzac, Uzès et remontait très haut jusqu'au Dauphiné. Les sédiments marins se déposaient sur le fond et formèrent cette mollasse calcaire que l'on appelle dans notre région "pierre du Pont du Gard", ou localement, "pierre de Vers" ou encore "pierre de Castillon".
            Le rivage se situait probablement à proximité des actuelles carrières de Vers , d'où une explication possible de la découverte de la molaire du mastodonte, mammifère terrestre.

            Les Romains utilisèrent la molasse pour construire une grande partie de l'aqueduc. Cette pierre, de meilleure qualité en profondeur, est toujours exploitée dans les carrières de Vers-Pont-du-Gard et de Castillon-du-Gard.

  3 . Quelques mots sur la molasse

      Selon J. Perriaux, professeur à l'Université se Grenoble, l'un des deux cents co-auteurs du monumental ouvrage "synthèse géologique du sud-Est de la France", le terme molasse utilisé depuis le XIVème siècle par les carriers et les maîtres maçons de la Suisse orientale, de la Savoie, du Dauphiné et de la Provence (...) d'abord et pendant longtemps il servit à désigner une roche. Mais, depuis environ un siècle, les géologues l'utilisent pour désigner un certain faciès sédimentaire. Enfin ce terme, appliqué à des formations voire à des bassins, (...) désigne d'abord une roche (...) un grès feldspathique à ciment calcaire. (...) à cause de sa tendreté certains auteurs français orthographiaient mollasse (du latin mollis, tendre) alors que les premiers auteurs et la totalité des étrangers écrivaient molasse (du latin molare, moudre  ou mola , meule, car les Suisses y taillaient jadis des meules). L'usage actuel est de conserver cette orthographe primitive. (...) le terme mollasse désigne ensuite un faciès (...) des calcaires lacustres ou marins et des évaporites. (...) le terme mollasse désigne enfin des formations (...) très utilisées. Le terme molasse est parfois employé de façon abusive et erronée, notamment lorsqu'il désigne un faciès. C'est pourquoi certains auteurs ont souhaité restreindre son emploi ou même préconiser sa suppression de la littérature scientifique. Cependant, et à condition qu'il soit bien précisé, ce terme peut encore rendre de nombreux  services.

           Quand nous parlons de molasse ou pierre du Pont du Gard il s'agit bien du calcaire coquillier qui s'est formé dans la région basse de la mer miocène, autour de l'actuel bassin du Rhône.

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